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La faillite de la paix

La fin de la Première Guerre mondiale : une paix restaurée ?

L'armistice est signé le 11 novembre 1918, mais les combattants et leurs familles gardent de lourdes séquelles. La paix est fragile...

La Première Guerre mondiale : esquisse d'un bilan

La signature de l'armistice le 11 novembre 1918 met un terme à la Première Guerre mondiale. La paix nouvellement restaurée par le traité de Versailles peut-elle réellement être maintenue ? De nombreuses raisons permettent d'en douter.

Alors que l'armistice est signé, les pays belligérants pleurent leurs neuf millions de morts. Les soldats disparus laissent derrière eux plus de trois millions de veuves et six millions d’orphelins. Le deuil, immense, est présent dans chaque famille. La réinsertion est difficile pour les anciens combattants, en particulier pour les « gueules cassées » qui portent dans leurs chairs et dans leurs âmes les stigmates de cette guerre honnie. Le bilan économique est amer : le financement des dépenses de guerre a grevé l’économie des pays belligérants, contraints à l’emprunt et à la dévaluation. La population, déjà endeuillée, doit faire face à la hausse des prix et à ses conséquences directes sur la vie quotidienne. Désormais, ce sont les États-Unis qui occupent la place de première puissance mondiale.

Dans les riches régions agricoles, minières et industrielles du Nord-Est de la France, dévastées par la violence des combats, nombreux sont ceux qui ont perdu leur habitation et leur emploi. L’urgence est à la reconstruction, mais avec la guerre a disparu toute une partie de la population active qui aurait pu y œuvrer.

La Première Guerre mondiale a aussi modifié les rapports entre les sexes. Pendant quatre ans, les femmes ont exercé des métiers jusque-là réservés à leurs maris (chefs d’entreprises, ouvrières en usine…). Pourtant le retour de la paix est souvent synonyme pour elles de retour au foyer. Leurs voix s’élèvent alors pour plus d’égalité, mais leurs revendications politiques notamment n’obtiennent pas partout le même écho : alors que les Anglaises, les Allemandes et les Américaines obtiennent le droit de vote à la fin de la Première Guerre mondiale, les Françaises doivent attendre 1945.

Le Traité de Versailles ou "Diktat de Versailles"

Un traité conçu par les vainqueurs et pour les vainqueurs

Au lieu de sceller la paix, le traité de Versailles engendre frustrations et rancoeurs entre les belligérants de la Première Guerre mondiale. En Allemagne, on parle du « diktat de Versailles ».

Seuls les vainqueurs participent aux négociations de paix. Cet élément est capital pour comprendre les frustrations et les rancœurs qui vont s’amplifier par la suite. À partir de janvier 1919, les États vainqueurs se retrouvent à Versailles et entament une conférence de paix. La France, le Royaume-Uni, l’Italie et les États-Unis sont les quatre grandes puissances qui y siègent. Le 28 juin 1919, l’Allemagne est contrainte de signer le traité de Versailles sans avoir pu en discuter les termes. Les conditions sont drastiques : le pays doit réduire son armée à 100 000 hommes, démilitariser la rive gauche du Rhin et payer d’énormes « réparations » au titre des dommages de guerre. Son territoire est réduit de 15% et l'Alsace-Lorraine est rendue à la France. Surtout, elle se voit obligée d’accepter l’entière responsabilité du déclenchement de la guerre. Quatre autres traités sont ensuite signés avec ses anciens alliés.

Immédiatement, les contestations fusent. En Allemagne, l’extrême sévérité du traité de Versailles lui vaut le qualificatif de « Diktat ». Le remaniement des frontières consécutif à l’éclatement de l’empire austro-hongrois provoque des revendications territoriales en Italie, en URSS, en Hongrie et en Allemagne. Même la France n’est pas entièrement satisfaite car elle aurait voulu obtenir l'occupation permanente de la rive gauche du Rhin afin d'assurer sa sécurité. Au lieu de sceller la paix, le traité de Versailles porte en lui les germes d’une nouvelle guerre.

Extraits du Traité de Versailles :

Article 51 - Les territoires cédés à l'Allemagne en 1917 [l'Alsace et la Lorraine] sont réintégrés dans la souveraineté française à date de l'armistice du 11 novembre 1918.

Article 171 - La fabrication de tanks est interdite.

Article 232 - Les gouvernements alliés exigent, et l'Allemagne en prend l'engagement, que soient réparés tous les dommages causés à la population civile des Alliés et à ses biens.

L'échec de la Société des Nations

Proposée en 1918, la Société des Nations est un échec. Elle sera remplacée par l'Organisation des Nations Unies à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Proposée dès 1918 par le président américain Wilson, la Société des Nations est censée prévenir et résoudre les conflits armés grâce à l’arbitrage et au principe de sécurité collective. Son acte fondateur, le pacte de la Société des Nations, figure en partie I du traité de Versailles. L’organisme voit le jour en 1920 et son siège est fixé à Genève, dans un pays neutre. Les décisions sont votées par une Assemblée et exécutées par un Conseil. Elles peuvent également être soumises à l’autorité d’une cour permanente de justice. Les 32 pays vainqueurs signataires des traités de paix adhèrent à la Société des Nations dès sa création. Elle compte bientôt dans ses rangs l’Allemagne, qui la rejoint en 1926.

L’organisation parvient à régler un certain nombre de conflits mais ses limites se font rapidement sentir. Le Congrès américain, en refusant la ratification du traité de Versailles, s’est aussi opposé à l’adhésion des États-Unis à la Société des Nations, privée ainsi d’un précieux soutien. De plus, dépourvue de force armée, elle dépend des grandes puissances pour faire appliquer ses résolutions. Mais cela s’avère rapidement irréalisable, dans un climat international où s’opposent pacifisme et esprit de revanche. Dès lors, il est impossible pour elle d’endiguer la montée des régimes totalitaires et de répondre à leurs agressions répétées. Le retrait du Japon et de l’Allemagne en 1933 signe son échec. La Société des Nations, qui n’a pu empêcher la Seconde Guerre mondiale, est remplacée par l’Organisation des Nations Unies en 1945.

Extraits du pacte de la Société des Nations, inscrit en partie I du Traité de Versailles :

Article 10 - Les membres de la Société s’engagent à respecter et à maintenir contre toute agression extérieure l’intégrité territoriale et l’indépendance politique présente de tous les membres de la Société [...].

Article 11 - Il est expressément déclaré que toute guerre ou menace de guerre [...] intéresse la Société toute entière et que celle-ci doit prendre les mesures propres à sauvegarder efficacement la paix des Nations [...].